Histoire, mémoire et révolutions dans Viva : une enquête de Patrick Deville
Résumé
S'il affirme préférer la géographie, Patrick Deville dans Viva se présente plutôt comme un historien. Ainsi, le livre s'ouvre sur une citation de Walter Benjamin tirée de son essai Sur le concept d'histoire. Mais surtout, à travers l'objet de réflexion central qu'est la révolution – politique avec Trotsky, esthétique avec Malcolm Lowry –, Deville interroge la notion même d'histoire, de progrès de l'histoire. Pour ce faire, il emprunte un certain nombre de postures et de méthodes à l'historien. Cependant, il choisit aussi d'autres voies moins orthodoxes et très éloignées de l'objectivité attendue du chercheur – l'anachronisme, les coïncidences et les télescopages, les montages de temporalités hétérogènes, le principe analogique, le recours à la fiction. Cette apparente désinvolture correspond pourtant à un choix méthodologique conscient proche de celui défini par Walter Benjamin dans ses travaux menés sur les images de l’Histoire dans Paris, capitale du XIXe siècle : il s'agit pour l'enquêteur d'échapper à la représentation du fait historique comme passé fixe et figé et de rechercher plutôt à mettre en perspective les passés révolutionnaires convoqués et son présent. Sa visée à la fois éthique et politique consiste à constituer dans le mouvement même de l'enquête un lieu de mémoire des révolutions, de leur déclin mais aussi de leur aura. À la différence des sciences humaines et de la science historique en particulier, la littérature de terrain selon Deville colore et complexifie son objet en le confrontant aux désirs, aux enthousiasmes et à la mélancolie de l'enquêteur. Ainsi, elle s'adresse à notre présent.
Mots-clés
2012 | Revue critique de fixxion française contemporaine | (ISSN 2033-7019) | Habillage: Ivan Arickx | Graphisme: Jeanne Monpeurt
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